La moto au service de l'aéronautique !
Le Musée de la Vie wallonne détient dans ses collections un véritable joyau dans le domaine de l'histoire motocycliste : la Gillet ayant appartenu au célèbre aventurier Robert Fabry. L'incroyable équipée de ce jeune lieutenant aviateur débute en 1925. Les vols entre la Belgique et le Congo passent par l'Égypte, seule voie sûre et connue à l'époque, mais obligeant les avions à faire un immense détour. C'est dans ce contexte que Robert Fabry imagine une nouvelle ligne, directe cette fois, traversant le Sahara. Cependant, le désert n'ayant pas encore été totalement exploré, l'armée et la compagnie aérienne Sabena, créée à peine deux ans plus tôt, refusent cette proposition qu'ils jugent trop risquée. Le Liégeois, âgé seulement de 26 ans, décide dès lors de réaliser tous les repérages préliminaires par voie terrestre. Il propose son ambitieux projet à Léon Gillet, très enthousiaste face à l'idée d'asseoir un peu plus la notoriété de sa firme active depuis seulement 6 ans. Il lui confie une 350cc Sport ayant fait ses preuves lors des précédentes aventures à travers le monde du journaliste français Robert Sexé.
Un voyage inoubliable
Renforcée d'un side-car, la solide « Tour du monde » est fin prête en décembre 1926 et capable de transporter 350kg de matériel. Après sa première étape à Marseille, Fabry embarque pour Alger avant de rejoindre Casablanca puis Dakar sur des routes chaotiques. La suite de son périple en Afrique n'est pas de tout repos. En effet, de nombreux passages infranchissables l'obligent à démonter et remonter plus de 27 fois sa moto, parfois sur des distances de plus de 70 km. Fabry n'oubliera jamais le jour où sa Gillet se bloque dans les rails du chemin de fer congolais et en sort in extremis avant l'arrivée du train. Inoubliable également la nuit où il trouve refuge dans une hutte pour éviter une attaque d'hyènes ou encore le transport de sa 350cc Sport sur une pirogue de fortune pour traverser les cours d'eau africains.
Son expédition, digne des plus grands films hollywoodiens, lui vaut tous les honneurs lors de son arrivée à Élisabethville. Il rebrousse alors chemin et, après plus de 20.000 km parcourus en 10 mois, fait une arrivée remarquée au Salon de Paris de 1927. Grâce à ce challenge relevé, Fabry réalise le nouveau tracé aérien Bruxelles-Congo en 1930. Léon Gillet, quant à lui, prouve une nouvelle fois au monde la qualité de ses motos.
Et Robert Sexé nous direz-vous? Rendez-vous lors d'un prochain focus pour découvrir ses extraordinaires aventures à moto.
William Ramacciotti, Chargé de projets, Département Médiation culturelle
Illustrations :
1. 2. et 3. Gillet Sport avec side-car du lieutenant Robert Fabry, monocylindre 350cc, 1926, coll. Musée de la Vie wallonne.
4. Départ du raid du lieutenant Robert Fabry sur sa Gillet 350cc, 1926, coll. Musée de la Vie wallonne.
5. Parcours du Lieutenant Fabry à travers l'Afrique à partir de Liège, 1926-1927, coll. Musée de la Vie wallonne.
Bibliographie :
CAMPION Yves, Les motos Gillet Herstal 1919-1959, GraphiGriffe Éditions, Stavelot, 2010.
Cycles et motocycles : des origines à 1935, catalogue d'exposition, Éditions Musée de la Vie wallonne, Liège, 4 juin – 17 octobre 1971.
DUCHATEAU Egon, HUYLEBROECK Geert, JONCKHEERE Nick, LEMBRECHTS Peter et VAN EYCKEN Rik, A-Z des motos belges, Editions Freson, Kumtich, 2009.
KUPELIAN Jacques et SIRTAINE Jacques, Motos belges, Overijse, 1983.
Livre d'or de l'automobile et de la motocyclette, Royal Motor Union, Liège, 1951.